mercredi 23 septembre 2009

extrait fantastique

Un billet anonyme a prévenu qu'« un crime serait commis pendant la première messe du Jour des Morts ».]
Encore quatre minutes ! Les oraisons. Le dernier Évangile ! Et ce serait la sortie ! Et il n'y aurait pas eu de crime ! Car l'avertissement disait bien : la première messe...La preuve que c'était fini, c'est que le bedeau se levait, pénétrait dans la sacristie... La comtesse de Saint-Fiacre avait à nouveau la tête entre les mains. Elle ne bougeait pas. La plupart des autres vieilles étaient aussi rigides. « Ite missa est...»... « La messe est dite »... Alors seulement Maigret sentit combien il avait été angoissé. Il s'en était à peine rendu compte. Il poussa un involontaire soupir. Il attendit avec impatience la fin du dernier Évangile, en pensant qu'il allait respirer l'air frais du dehors, voir les gens s'agiter, les entendre parler de choses et d'autres... Les vieilles s'éveillaient toutes à la fois. Les pieds remuaient sur les froids carreaux bleus du temple. Une paysanne se dirigea vers la sortie, puis une autre. Le sacristain parut avec un éteignoir, et un filet de fumée bleue remplaça la flamme des bougies. Le jour était né. Une lumière grise pénétrait dans la nef en même temps que des courants d'air. Il restait trois personnes... Deux... Une chaise remuait... Il ne restait plus que la comtesse, et les nerfs de Maigret se crispèrent d'impatience... Le sacristain, qui avait terminé sa tâche, regarda Mme de Saint-Fiacre. Une hésitation passa sur son visage. Au même moment le commissaire s'avança. Ils furent deux tout près d'elle, à s'étonner de son immobilité, à chercher à voir le visage que cachaient les mains jointes. Maigret, impressionné, toucha l'épaule. Et le corps vacilla, comme si son équilibre n'eût tenu qu'à un rien, roula par terre, resta inerte. La comtesse de Saint-Fiacre était morte.

Aucun commentaire: